De Dakhla à Smara par la piste.
Cette année, nous ne franchirons pas le Tropique du Cancer !
Après un beau séjour à Dakhla, nous entamons notre remontée vers le nord. Un périple en plein désert pour rejoindre Smara.
600 kms de regs austères, loin de l’image d’Epinal du Sahara (ses dunes, ses caravanes de dromadaires et ses Touaregs …). Car au lieu de reprendre la Nationale 1 le long de la côte, nous allons remonter par les pistes à l’est, non loin des frontières mauritaniennes puis algériennes.
Samedi 24 février 2018 :
Nous quittons notre beau bivouac pour rejoindre Dakhla au bout de sa péninsule. Mais au lieu de prendre la route, nous trouvons des pistes qui font le tour de la lagune dans des paysages étonnants.
Paysages lunaires de la lagune de Dakhla.
Après 20 kms de piste nous retrouvons la route et faisons arrêt aux parcs à huitres, avant la ville. C’est une étape incontournable pour nous : il y a là un resto en contrebas de la falaise où, dans un cadre magnifique, l’on déguste des huitres, crues ou en tagine, du poisson, des moules …
Le cadre est superbe, la décoration … on va dire ... insolite au Maroc !
Quelques courses en ville et un arrêt au Samarkand, notre café préféré au bord de la lagune occupent l’après-midi. J’ai aussi le temps de passer chez mon coiffeur habituel (vous savez, celui qui coiffe le Pacha de Dakhla) pour un bon rafraîchissement des cheveux et de la barbe, terminé par une grande aspersion d’eau de roses.
L’anecdote du jour : nous gagnons dans la soirée l’inénarrable camping Moussafir. Nous avons vraiment envie d’une vraie douche, même si nous savons que l’eau y est soufrée et dégage une odeur peu agréable. En réalité cette fois c’est pire, il n’y a pas d’eau chaude. « Demain Inch Allah ! ». Sauf que demain nous n’y serons plus …
Le camping Moussafir.
Ce sera l’occasion pour Nickie d’essayer la douche de Trottinette, maintenant que nous avons un chauffe-eau en bon état de marche … et ça fonctionne bien (un peu moins spacieux qu'à la maison bien sûr!).
Dimanche 25 février 2018 :
Une fois le linge sec (il y a eu lessive hier soir, car grand vent…) nous retournons au souk pour les dernières courses et l’approvisionnement en gasoil avant d’affronter les quelques jours de pistes désertiques prévues au programme. Je fais le plus gros plein de ma vie : pour la première fois je complète les deux réservoirs de Trottinette. Résultat, un ajout de 212 litres de gazole, par chance pour le portefeuille deux fois moins cher qu’en France …
Dans l’après-midi nous reprenons la piste qui contourne la lagune et essayons (sans grand succès) de trouver un coin abrité du vent qui comme d’habitude est assez violent ici.
L’anecdote du jour : ce sera pour aujourd’hui quelques images glanées dans la ville …
Un vieux pick-up Land Rover en restauration. Il y a du travail mais peut-être fera t'il encore quelques centaines de milliers de kms !
Lundi 26 février 2018 :
Retour au PK40, carrefour de la nationale 1 et de la route de Dakhla. Malgré un panneau alléchant, nous ne prendrons pas cette fois la route vers le sud.
Direction l’est et Bir Anzarane pour rejoindre dans quelques jours Smara, 600 kms plus loin. Nous savons qu’il nous faudra pour cela parcourir quatre cents kilomètres de piste en plein Sahara mais pour l’instant la route jusqu’à Bir Anzarane est goudronnée pour les besoins de l’armée marocaine. Elle est pratiquement la seule à l’emprunter, passées quelques carrières près de Dakhla, car elle traverse un reg absolument dénudé et peu propice à la vie.
Du reg, du reg, du reg ...
Vers 14 heures nous atteignons Bir Anzarane peuplée de quelques militaires et d’un grand troupeau de chameau. Le seul intérêt de l’endroit est un puits qui délivre à 40 mètres de profondeur une excellente eau douce. Avant les forages modernes, il était unique dans tout l’ancien Rio de Oro, ce qui en faisait un point hautement stratégique.
Bir Anzarane, ses militaires, ses chameaux !
Nous ne trainons pas, par crainte que des militaires ne viennent nous poser des questions voire nous interdire de prendre la piste de Smara, car nous allons passer non loin des zones occupées par le Polisario. Mais apparemment nous n’intéressons pas les quelques-uns que nous croisons …
La piste est assez roulante et nous avançons bien jusqu’au moment où une zone peuplée de vieux acacias nous incite à stopper pour le bivouac. C’est un endroit bien paisible où nous goûtons au silence du désert et à la douce chaleur d’un soir sans vent.
Nous avions presque oublié que ça existait après ces quelques jours à Dakhla !
Encore un beau bivouac ...
La trace de la première journée. Les photos sont un peu décalées mais ce n'est pas grave. Par contre, la pointe de vitesse à 631 km/h !!!!
L’anecdote du jour : depuis que nous sommes partis les jours rallongent et ceci d’autant plus que nous progressons vers le sud et vers l’ouest ce qui allonge nos soirées. La nuit qui nous enveloppait dès 18 h ne survient désormais qu’à 19 heures 30 (soit 20 h 30 heure française).
Mardi 27 février 2018 :
Il a régné cette nuit un « silence étourdissant » comme on n’en trouve qu’en ces lieux vraiment éloignés de tout. Aucune pollution lumineuse non plus : seulement la lune et les étoiles ...
Nous reprenons la piste encadrée par des repères constitués de tas de terre surmontés parfois de cailloux. Ils ont été dressés pour baliser le parcours d’un Paris-Dakar d’où le nom de la piste « RPD1 » (il y a une RPD2 un peu plus à l’est).
Cette piste est très roulante et nous allons donc bon train, dans un reg qui oscille entre le « totalement dénudé » et le « presque totalement dénudé » !
Il y a toutefois quelques passages de bosses, de cailloux ou de sable qui obligent à une grande vigilance. Toute erreur se paie cash : une grosse secousse et c’est une porte de placard qui tombe, les affaires de toilette en vrac dans la salle de bain, la semoule qui se répand un peu partout …
La chaleur produit des effets de mirage au loin : des forêts d’acacias nous apparaissent, baignant dans l’eau d’un lac. Evidemment quand on se rapproche il n’y a pas d’eau et un acacia tous les cent mètres …
Le reg ...
Seul évènement de la journée : un puits à quelques 150 kms de Bir Anzarane, servant d’étape et de ravitaillement aux troupeaux de chameaux qui s’aventurent dans ces contrées, comme en témoignent les nombreuses crottes qui jonchent le sol. Ce puits doit être important pour les nomades car l'eau est rare dans ces contrées. Pour preuve, des pistes y mènent des quatre coins de l'horizon.
Quant à nous, nous profitons de l’aubaine pour un shampoing bien mérité !
Au puits ...
En fin d’après-midi les zones « arborées » se font rares et nous devons parcourir quelques kilomètres à l’est de la piste pour rejoindre un petit groupe d’acacias repérés de loin. Ils serviront de cadre à notre bivouac …
Nous y trouvons un amas de douilles de mitrailleuses. Nous sommes probablement sur le lieu d’un ancien affrontement entre le Maroc et le Polisario.
L’anecdote du jour : dans ces paysages désolés, nous cherchons toujours à nous arrêter, midi ou soir, auprès de quelques arbres, invariablement des acacias, il n'y a que ça ici. La peur du vide probablement !
Le côté positif c’est que se trouve concentrée dans ces endroits le peu de vie du désert : quelques oiseaux et scarabées essentiellement qui espèrent trouver des reliefs de notre passage.
L’inconvénient c’est que ces endroits, acacias obligent, sont constellés de bouts de branches extrêmement acérées. Les tongs et même les Crocs sont déconseillées car les longues et dures épines les traversent facilement !
A cela s’ajoutent les « cram-crams », en forme de petites boules ou de punaises à plusieurs piques qui se fichent dans les semelles (comme dans nos pneus !).
Mercredi 28 février 2018 :
Encore 125 kms de pistes avant de retrouver le goudron. Nous n'y arriverons qu'en milieu d'après-midi car après quelques kilomètres faciles, ça se gâte : les cailloux, les bosses, les saignées et, pire que tout, la tôle ondulée, sont au menu. Ce qu’on appelle une « piste Orangina » (Secouez-moi ! Secouez-moi !).
Nos distractions du jour : les murs de sable édifiés par l’armée marocaine pendant la guerre contre le Polisario, et quelques postes de garde.
Pour le déjeuner, c’est chacun chez soi : le vent se lève entrainant des nuées de poussière et de sable et il est impossible de manger dehors comme nous le faisons habituellement.
En cours d’après-midi la tempête de sable s’intensifie et plombe le ciel devant nous. Par chance le vent souffle dans notre dos ce qui rend la chose un peu moins désagréable. Elle atteint son maximum quand nous retrouvons le goudron à proximité de Smara.
En trois jours sur la piste, nous n’aurons vu qu’un véhicule : trois jeunes saharaouis qui se sont arrêtés à notre premier bivouac pour nous demander si tout allait bien …
Nous reportons au lendemain la visite de Smara car il nous faut trouver un abri pour la nuit. Vu les conditions atmosphériques, nous optons pour le seul camping de la région, situé à quelques kilomètres de la ville.
L’anecdote du jour : « camping » c’est peut-être un grand mot pour cet endroit improbable dénué d’eau chaude, de vraies toilettes et d’électricité. Par contre un mur nous coupe un peu le vent, les jeunes marocains qui s’en occupent sont d’une grande gentillesse, c’est propre, et la décoration, très kitch, est sympa. Un camping « croquignolet » !
Bien sûr on nous offre le thé et le soir un groupe électrogène est mis en route quelques minutes pour nous faire apprécier quelques illuminations du décor.
Le camping de Smara.
A suivre : de Smara au Cap Draâ, toujours par les pistes ...
Commenter cet article