2013 - De Sidi Ifni à Boujdour
Samedi 16 février 2013
C'est à regret que nous quittons Sidi Ifni vers 8h 30 pour Guelmim, "la porte du désert" (le désert est vaste, il y a beaucoup de portes !). Une belle route à travers les collines emplies de figuiers de barbarie nous y mène et nous allons directement au marché heb-dromadaire puisque c'est le jour. En fait, de dromadaires il n'y en a plus guère car la sècheresse sévit dans la région et les troupeaux sont partis à la recherche de pâturages dans le sud. Il en reste une vingtaine peut-être, entourés de vaches, moutons, chèvres ...
Par contre le marché aux légumes est bien garni et très coloré. C'est le grand marché ou affluent tous les paysans et nomades de la région et on y trouve aussi tout ce qu'on peut imaginer de vêtements, quincaillerie, outils, bref un bric à brac extraordinaire.
En fin de matinée nous gagnons l'oasis de Tighmert, havre de verdure et de paix au sein de cette région semi-désertique . Nous y avons réservé une nuit à la Maison Saharaouie, une petite auberge "tourisme solidaire" tenue par Saliha. Une petite promenade dans la palmeraie nous permet de découvrir les cultures, notamment de petits champs de blé d'un vert très tendre, les systèmes d'irrigation, les vieilles maisons en pisé...
A chaque coin de la palmeraie les "petits nânes" sont là pour nous rappeler notre petit Thédore à qui ces deux photos sont spécialement dédicacées !
L'après-midi nous partons avec Sarah, une anglo-canadienne rencontrée sur place,visiter le petit musée d'Abdou dans la palmeraie. Il a rassemblé tout un ensemble très intéressant d'objets anciens, coffres à thé, selles, palanquins, instruments agricoles... et d'étonnants masques peints sur des tiges de palmiers, servant à faire des incantations censées favoriser la pluie. Comme nous dit le fils d'Abdou, portable à la main : "Ils ont arrêté, ça ne marchait pas !"
Comme il est très bavard, nous rentrons à la nuit tombante.
Douche extra dans le petit hammam de la maison.
Le soir nous nous retrouvons une dizaine autour d'un excellent tagine au dromadaire. Beaucoup sont assez originaux et grands voyageurs ce qui donne une soirée fort animée et sympathique.
Sidi Ifni - Tighmert : 75 kms
L'anecdote du jour
Abdou est à lui seul une source inépuisable d'anecdotes. Il raconte par exemple comment, étant maintenant bien connu grâce au Guide du routard, les faux Abdou se sont multipliés dans le coin. Ils interceptent les touristes et se font passer pour lui ou même disent qu'il est mort, que son musée s'est effondré... pour capter les visiteurs.
Ou encore comment lui, athée mais néanmoins harcelé par les religieux du coin pour payer une "taxe-mosquée", il a fini par leur déclarer publiquement "Je suis catholique marocain, vive le Roi, vive le Maroc", ce qui a mis fin à leurs demandes.
Le saviez-vous ?
Il existe des soutiens-gorge pour dromadaire. Ils ne sont évidemment pas utilisés à des fins esthétiques mais pour éviter que les petits têtent tout le lait des chamelles. En voici quelques exemplaires...
Dimanche 17 février 2013
Après un délicieux petit-déjeuner pris sous la tente, nous quittons à regrets la maison de Saliha et la palmeraie, mais nous partons avec Saliha qui profite de son dimanche pour découvrir de nouvelles merveilles et nous a conviés à la suivre... Au passage, nous prenons Hassan dans son village; il travaille avec Saliha et propose un petit Paradis dans son jardin verdoyant. Au passage, il ramasse fèves, carottes et tomates pour le pique-nique !
Après quelques kilomètres de piste, nous découvrons une petite oasis cachée avec un puits et une ombre propice au repos... Pique-nique, thé obligatoire et sieste, puis nous reprenons la route seuls, direction Tan-Tan, porte des territoires sarahouis. Nous roulons dans des paysages lunaires, sur des pistes bien cahotiques et quelques portions de goudron. Au cours de l'après-midi, avant de retrouver la route principale, nous ne rencontrons que quatre voitures... Il ne faut pas tomber en panne !
Nous arrivons au coucher du soleil à notre destination, le ksar Tafnidilt, un accueil hôtel/bivouac crée de toutes pièces au milieu de nulle part près de Tan Tan. C'est à couper le souffle. Nous montons la tente de toit et finissons la journée par un très bon dîner au restau avec au menu un tagine de dromadaire arrosé d'un bon vin marocain.
Tighmert - Tafnidilt : 290 kms
L'anecdote du jour
Comme c'est dimanche, il y en aura deux !
Pour la première, la photo parle d'elle-même, il n'y a pas de trucage !
La deuxième est également liée à notre route. Alors que nous grimpons un petit col devant nous amener à une route groudonnée, la piste se dégrade de plus en plus jusqu'à ce qu'on se trouve face à d'énormes blocs de pierre. Je descend voir la situation et voit un peu plus loin qu'un énorme Catterpillar est en train de travailler. Le chauffeur me fait signe d'attendre un peu. Ma kain mouchkil ! Quelques instants plus tard la route est dégagée et nous poursuivons notre route (4x4 indispensable quand même !).
Le saviez-vous ?
Quand la sècheresse règne, les chamelles mangent des baies particulières qui les font avorter car elles savent qu'elles ne pourront pas nourir leurs petits. Pas si connes ces bêtes !
Lundi 18 février 2013
Nuit superbe au calme avec pour seuls voisins un couple de jeune allemands en HDJ80 avec lesquels nous échangeons quelques tuyaux et points GPS après le petit déjeûner.
Nous revoyons aussi avant de partir une bande de français qui étaient très bruyants la veille au restau : ils s'agit d'une bande de sablais qui randonnent en 4x4 avec Bruno Sellier, lui aussi sablais et pilote du Dakar.
Nous joignons rapidement Tan Tan pour quelques courses en épicerie et dans un petit marché très typique, puis Tan Tan plage apparemment sans intérêt.
Nous passons notre chemin d'autant plus que ce matin le ciel est gris et le vent frais, il fait tout juste 18°.
Nous roulons donc jusqu'à Sidi Akhfenir où nous avons prévu de passer deux jours. Déception ! Le bled est minable et les deux établissements possibles également décevants. Nous poursuivons donc jusqu'à Foum Agoutir, au bord de la lagune de Naïla où le paysage est superbe. Il s'y trouve un parking qui fait plus ou moins office de camping au bord de la lagune, et où sont déjà stationnés quelques camping cars.
Va pour un bivouac, nous avons de l'eau et de la nourriture pour deux jours.
Comme sur toute la côte depuis Tan Tan il y a beaucoup de pêcheurs, marocains ou touristes et je n'ai pas de peine à obtenir quelques tuyaux pour faire mes grands débuts. Résultats mitigés : trois sacs plastiques, pas mal de plantes aquatiques mais pour finir une belle petite raie électrique que je remets à l'eau car pendant ce temps Nickie a acheté pour 2 euros 50 une superbe lotte. Avec les ressources du bord elle la cuisine pour un superbe dîner dans la tente.
Les nuages s'éclaircissent juste à temps pour un très beau coucher de soleil sur la lagune.
Elle est pas belle la vie ?
Sans électricité les soirées sont courtes, un petit coup de peigne et hop au lit !
Tafnidilt - Naïla : 175 kms
L'anecdote du jour
Le premier camping-cariste pêcheur auquel je m'adresse pour avoir quelques infos est très gentil, m'offre des sardines pour appât, mais reste assez avare de renseignements. Par contre il ne lésine pas sur les blagues de l'almanach Vermot et toute la fin d'après-midi j'ai droit à "Robert m'a dit que j'ai pêché une seiche mais je suis pas sûr : elle était toute mouillée en sortant de l'eau" ou encore quand j'ai pêché ma raie "Tu vas pouvoir brancher ton frigo dessus !" etc... etc...
Le saviez-vous ?
Aujourd'hui à Foum Agoutir, la lune se lève à 15:22 et se couche à 3:40, c'est mon GPS qui me l'a dit ... et çà, je suis sûr que vous ne le saviez pas !
Mardi 19 février 2013
La soirée était idyllique, la nuit le fut un peu moins.
D'abord, la pluie et l'orage. Passe encore.
Entre deux grains, Nickie descend faire pipi mais l'échelle ripe : résultat, Nickie tombe, l'échelle casse !
La voici en bas et moi en haut tandis que forcit un vent à décorner des boeufs marocains. Nous passons le reste de la nuit à empêcher les tentes de s'envoler : moi la tente de toit dans laquelle je suis resté "dormir", Nickie la tente deux secondes heureusement lestée de grosses pierres, puisque faute d'échelle elle dort dans la voiture. Nous échangeons ... par SMS.
Au petit matin je saute en bas et constate qu'il y en fait peu de dégâts hormis l'échelle et un gros bleu à la fesse de Nickie. Nous prenons un petit déj. succint (pas question d'allumer le gaz avec le vent qu'il fait) et rangeons tant bien que mal le matériel. Les camping caristes voisins nous offrent un petit café chaud et nous reprenons la route.
Cette route est du genre toute droite et très chiante : du reg, du reg, du reg... avec parfois une petite dune qui tente une incursion sur la chaussée. Elle est surtout très étroite, avec un bas-côté fort peu avenant et on serre ls fesses chaque fois qu'on croise les gros camions. Quant à les doubler, c'est un exercice périlleux.
Vers Tarfaya on retrouve la mer avec régulièrement des petites maisons roses de pêcheurs (subventionnées par l'Etat marocain ?) et c'est un peu plus sympa.
Petite pensée pour Saint Exupéry au Cap Juby, étape de l'aéropostale avant St Louis.
Nous atteignons le campement "Le Bédouin" pour le déjeuner et prudemment nous nous installons dans une tente caïdale (la yourte marocaine) car le vent souffle encore pas mal. Le camp est installé au milieu de nulle part et est assez rustique mais nous décidons d'y rester deux jours car nous avons besoin d'un peu de temps, d'abord pour récupérer de notre mauvaise nuit, ensuite pour remettre en ordre et réviser un peu le matériel.
Sieste, bricolage, lavage puis petite ballade vers une source et une cascade modeste certes mais on est quand même au Sahara ! Nous dînons d'un troisième tagine de chameau consécutif (mais ils sont tout à fait différents à chaque fois) en compagnie d'un couple d'allemands qui revient de Mauritanie. Ils nous confirment, comme d'autres voyageurs, qu'il n'y a pas de problèmes là-bas sinon ceux liés au manque de touristes qui ont entraîné la fermeture de nombreuses petites structures.
Naïla - Daoura : 150 kms
L'anecdote du jour
Luc le patron n'étant pas là, je demande au jeune marocain qui tient le camp en son absence si nous pourrions avoir un guide pour un tour dans les dunes et la sebkha, et à quelles conditions. Il part chercher un document sur lequel c'est écrit mais revient quelques minutes plus tard en déclarant piteux : "Je vais téléphoner au patron, la chèvre a mangé le cahier" !
Le saviez-vous ?
Le Bédouin est situé au bord de la grande sebkha d'Oum Dba. Les sebkhas sont des dépressions autrefois occupées par la mer et situées au-dessous de son niveau. Elles forment un paysage assez impressionnant qui fait penser aux grands cratères de la lune. Très souvent, comme ici, on y exploite le sel depuis des temps immémoriaux. Autrefois extrait sous forme de plaques, il était une des richesses du commerce saharien. Aujourd'hui il est exploité mécaniquement sur de grandes surfaces qui paraissent couvertes de neige.
Mercredi 20 février 2013
Après une super nuit de récup, nous partons en ballade sur les pistes (seuls pour cause de chèvre comme vous le savez !) avec pour objectif de faire le tour de la sebkha. Nous longeons le plateau qui l'entoure, cerné par les dunes qui s'étendent ensuite jusqu'à la mer à 30 kms de là. La piste que nous suivons devient de plus en plus ensablée et nous devons chercher des passages entre les dunes jusqu'au moment où l'une d'entre elles nous barre la route : à droite le vide de la falaise, devant et à gauche des grandes masses de sable. Nous préférons renoncer ...
Comme nous n'avons pas atteint les mines de sel, nous repartons l'après-midi dans l'autre sens pour faire le demi tour manquant. Nous trouvons une piste qui descend dans la sebkha et traversons toute l'exploitation.
Puis, pour terminer la journée, nous repartons voir nos dunes de ce matin au soleil couchant avec une lumière est magique.
Au retour, nous trouvons le camp bien rempli : un groupe de marcheurs, des camping cars, des 4x4 et toute une équipe de hollandais qui réalise un raid Amsterdam - Dakar.
La grande tente où sont servis les repas est plus animée qu'hier soir et le repas tout aussi délicieux.
L'anecdote du jour
La nationale 1 qui descend jusqu'à la frontière mauritanienne est réputée dangereuse. Elle est étroite, les lignes droites sont interminables, le vent souvent violent, il y circule des Land Rover hors d'âge et de gros camions...
Cet après-midi, alors que nous l'empruntons sur quelques kms pour aller aux salines, une voiture en face de nous se déporte progressivement jusqu'à se trouver en face de nous à une cinquantaine de mètres. Heureusement son chauffeur se réveille juste avant que je ne me lance sur le bas-côté en dernier ressort...
Le saviez-vous ?
Nous sommes désormais au Sahara occidental, territoire revendiqué par les saharaouis mais occupé depuis 1975 par les marocains. Le principe d'un référendum d'autodétermination a été adopté en... 1984 et est toujours en négociations. Le royaume marocain pendant tout ce temps favorise l'implantation de ses ressortissants sur le territoire et l'une des applications visibles pour nous est la détaxe de nombreux produits. Par exemple, le gasole est à moins de 0,60 euros, les cigarettes à partir d'1,50.
Daoura - Daoura : 100 kms
Jeudi 21 février 2013
Encore une excellente nuit suivie d'un petit déjeûner local (thé vert, olives, miel, oeufs, huile d'argan...) et nous reprenons la route vers Laayoune. Après quelques courses dans une petite épicerie, nous passons devant une sorte de supermarché et nous complétons nos achats pour la suite de la descente, quelques bivouacs étant probables. Vers midi nous atteignons Laayoune Plage où nous devons livrer, de la part de Jean-Paul de Rabat, un petit sac de ciment à Dédé et Asma qui sont installé là depuis 23 ans. Nous sommes invités à un repas pantagruélique et Dédé nous raconte un tas d'histoires pasionnantes sur son installation et la vie locale.
Scènes de la côte près de Laayoune.
C'est bien repus que nous retrouvons la nationale, plus monotone que jamais. Nous atteignons Boujdour (l'ancien Cap Bogador des portuguais) en fin d'après-midi et nous installons au camping où se trouvent déjà six des camping cars avec lesquels nous allons voyager en Mauritanie.
Douara - Boudjour : 245 kms
L'anecdote du jour
Beaucoup de saharaouis utilisent toujours de vieux Land Rover dont certains ont, je pense, une cinquantaine d'années et probablement dépassé le million de kms. Ils marchent parfois en crabe, supportent des chargements invraisemblables, mais roulent toujours. Un certains nombre de nomades les utilisent désormais pour suivre avec leur famille leurs troupeaux de chameaux ou de moutons.
Le saviez-vous ?
Laayoune est récemment resté six années entières sans une goutte de pluie !
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