2016 - Des cascades dans le désert.
Des cascades dans le désert ?!
C’est possible (comme disait Hassan Céhef), il y en a plusieurs exemples dans le Sahara.
Notre objectif des jours à venir est justement de profiter de la compagnie de Jean et Christine pour aller voir celles de Khawi Nam, au départ de la lagune de Naïla. Ce sera plus rassurant de le faire à deux 4x4, car même si la boucle prévue ne fait que 125 kms, l’accès est difficile et les pistes peu fréquentées car la région est totalement désertique.
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Samedi 27 février 2016 :
Nous restons aujourd’hui à Boujdour car la météo nous annonce du vent et un peu de pluie pour le week-end. Nous passons néanmoins une partie de la journée sur « notre » plage d’Aouziwel. Le vent y est moins fort qu’à Dakhla mais quand même soutenu. Il a pour grand avantage de dégager régulièrement le ciel de ses nuages … avant qu’un autre vague grise n’arrive.
Je me fais le plaisir de rouler un peu en 4x4 sur la plage. C’est un peu puéril, je sais, mais c’est tellement bon !
Par contre le vent ne m’incite pas à sortir mon matériel de pêche et nous restons tranquillement à observer les oiseaux : les goélands qui se reposent bout au vent, un vol de spatules qui monte péniblement vers le nord et surtout l’étonnant manège d’un goéland qui tente de briser une patate de mer en s’élevant pour la laisser choir d’une dizaine de mètres. Il renouvèle l’opération pendant un long moment, sans succès semble-t-il.
L’image du jour :
Depuis quelques années que nous venons au Maroc nous avons constaté d’énormes progrès au niveau de la propreté notamment dans les villes.
Malheureusement Boujdour n’a pas reçu la visite de M. Propre !
C’est certainement, de ce que nous avons vu, la ville la plus sale du Maroc avec des dépôts d’ordures partout dans les rues et les terrains vagues emplis de sacs plastiques. On se demande si ce ne sont pas les chèvres qui errent dans la ville qui font à elles seules le travail d’éboueurs.
L’anecdote du jour :
Au bout de la plage je suis allé voir un groupe de pêcheurs installés sur les rochers. Ils n’ont rien pêché depuis le matin ce qui n’entame pas le moins du monde leur moral.
Comme d’habitude leur accueil est extraordinaire : nous parlons de pêche bien sûr, mais je suis aussi convié à prendre le thé, à tester leurs petites pipes de hash et, pour finir dans la franche rigolade, l’un d’eux me propose de marier sa sœur. Quand je rétorque que j'ai déjà une femme, on me dit qu'il n'y a pas de problème, ça m'en fera deux !
Dimanche 28 février 2016 :
Comme avant-hier nous brulons les étapes et bouclons dans la journée le parcours réalisé en deux jours à la descente : de Boujdour à la lagune de Naïla via Laayoune et Tarfaya, soit 360 kilomètres. Le vent est toujours très fort face à nous et apporte de temps à autre une petite ondée assez insolite dans ces lieux arides. Ce n’est pas souvent que les dunes de sable qui jalonnent la route sont arrosées.
Nous nous installons face à la lagune. La falaise offre une vue superbe mais aucun abri contre le vent qui sifflera toute la nuit dans la caravane. Encore sommes-nous mieux lotis que les pêcheurs locaux qui ne disposent que d’abri de pierres ou de cabanes en bois.
La lagune et les baraques de pêcheurs.
L’anecdote du jour :
Pour agrémenter notre journée sur cette route monotone, nous nous arrêtons pique-niquer derrière une grande dune pour la vue qu’elle procure et pour nous abriter du vent.
Fausse bonne idée : il y a certes moins de vent, mais celui qui passe charrie le sable du haut de la dune qui vient assaisonner notre salade !
L’image du jour :
Il n’y a pas loin de la dune à l’assiette.
Coordonnées du pique-nique : N 27° 12,863’ W 013° 20,935’
Lundi 29 février 2016 :
Nous laissons la caravane pour deux jours à Naïla, confiée à un gardien,«ma kaïn mouchkil !».
Direction l’intérieur des terres et les sebkhas. Après la pluie de ces derniers jours, nous les trouvons remplies d’eau ce que nous n’avions jamais vu lors de nos précédents passages.
Notre piste débute par la traversée d’une petite sebkha qui par chance n’est pas inondée et pas trop boueuse. Un véhicule est passé récemment, nous suivons ses traces, ça passe !
De l’autre côté nous trouvons une surprenante ferme et de grands terrains cultivés en plein désert. Ce sera notre dernière trace de civilisation avant demain soir…
Un petit détour nous permet d’aller visiter une série de tombes préislamiques à quelques kilomètres de là. Ce sont des tumulus surmontés d’un appareillage de pierres plates agencées en cercle. Je n’ai pas trouvé d’informations sur l’ancienneté exacte de ces tombeaux dont nous trouverons plusieurs autres exemples sur notre piste (préislamiques d’accord, mais ont-ils 1.000, 2.000, 3000 ans ?).
Coordonnées des tombes : N 28° 00,590’ W 012° 08,700’
De cet endroit nous pouvons encore voir la mer et les grandes dunes situées près de la nationale.
Mais bientôt nous nous enfonçons vers l’intérieur et notre piste s’élève sur une succession de plateaux dominant d’impressionnantes sebkhas, progressivement desséchées.
Notre progression est lente car la piste comporte quelques belles grimpettes dans la caillasse, de la navigation au cap dans l’herbe à chameau et même un petit passage de sable dans lequel je me plante comme un débutant !
Vers 16 heures 30 nous atteignons notre but : le site de Khawi Nam.
L’oued du même nom est actuellement en eau et se jette par une série de trois cascades, dont la plus grande doit faire environ 75 mètres, au fond d’un canyon impressionnant.
L’ensemble est surprenant en plein Sahara et donne une impression de « début du monde ».
Nous installons notre camp derrière une falaise, à l’abri du vent, qui d’ailleurs à tendance à se calmer, ce qui nous permet de profiter pleinement du panorama qui s’offre à nous.
Coordonnées du bivouac : N 27° 40,660’ W 012° 12,800’
L’image du jour :
Tout au long des pistes sur les plateaux nous rencontrons ces curiosités géologiques : d’énormes pierres rondes en forme de meules.
Le saviez-vous ?
Les sebkhas sont des dépressions à fond plat inondables par des eaux de crue ou des remontées d'eaux profondes en périodes de pluie. Autrefois occupées par la mer et parfois situées au-dessous de son niveau, elles forment un paysage assez impressionnant qui fait penser aux grands cratères de la lune. Les sols fortement salés y limitent toute végétation, à l’exception de quelques plantes halophiles en périphérie. On y trouve par exemple la Salicornia arabica, cousine des salicornes de nos marais vendéens.
Depuis des temps immémoriaux le sel y est exploité. Autrefois extrait sous forme de plaques, il constituait une des richesses du commerce saharien.
Il est très dangereux d’y circuler : à quelques mètres près un sol roulant, dur et crouté, peut devenir un infâme bourbier dont il est impossible de s’extraire tout seul.
Les pistes du jour :
Mardi 1er mars 2016 :
Nous avons parfaitement dormi dans notre tente car le vent est complètement tombé dans la nuit. Ce matin, pas un souffle d’air et un silence parfait ce qui nous fait tout bizarre après quinze jours de vents violents. Le ciel est parfaitement dégagé et la journée s’annonce magnifique.
Comme nous anticipons un retour par le sud des sebkhas plus court que l’aller, nous pouvons prendre notre temps ce matin. Nous en profitons pour retourner aux cascades sous une autre lumière. Pas mal non plus !
Avant de partir, une petite grimpette sur les hauteurs qui dominent notre bivouac me permet de découvrir les ruines d'une place forte tenue par les espagnols. C’est toute une série de casemates en pierres qui permettaient de surveiller la frontière nord de leur « Rio de Oro ». Il semble que, peu avant leur départ en 1975, il y ait eu ici un affrontement avec le Polisario. Essayez d’imaginer la vie de ces soldats en plein désert, loin de tout, cernés par les rebelles saharaouis …
Vous me direz qu'au moins il y a de l'eau pas loin ... mais elle est très salée et dégage une odeur de soufre peu ragoutante !
Le retour est non seulement plus court mais aussi plus roulant que l’aller : moins de cailloux et plus de sable.
Un dernier coup d’œil sur les cascades et l’oued qui coule quelques centaines de mètres avant de disparaitre dans le sable …
… encore de beaux paysages de désert …
… et un long arrêt pique-nique au milieu de belles dunes de sable rouge qui contrastent avec le blanc environnant et nous rappellent, en moins grandiose, le Dead Vleï en Namibie.
Coordonnées du pique-nique : N 27° 51,108’ W 012° 13,411’
Le reste en images animées (ça secoue bien par moment, désolé, mais c’est comme ça sur les pistes … et encore je ne mets pas le pire !) :
Comme nous avons rejoint Naïla en milieu d’après-midi, nous remontons par la route jusqu’à El Ouatia pour bénéficier, au camping, d’une douche nécessaire et bien méritée.
L’anecdote du jour :
En deux jours nous aurons rencontré seulement deux vieux Land Rover : l’un à la ferme près du départ, l’autre sur la piste près de l’arrivée. Entre les deux, le grand « walou ».
L’image du jour :
Le désert ne l’est jamais totalement et l’on peut voir dans les dunes de nombreuses traces : oiseaux, gerboises, chameaux et surtout celles des scarabées qui tracent leurs arabesques dans le sable.
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