2014- De Boujdour à Sidi Ifni
Dimanche 9 mars :
Cette fois nous partons définitivement de Boujdour, plus de problèmes mécaniques. Le vent a tourné et, exceptionnellement, accompagne notre remontée vers le nord.
Nous nous arrêtons à Foum El Oued chez Dédé et Asmae, amis des Dumont de Rabat rencontrés l'année dernière. Ils nous offrent thé et gâteaux marocains et nous papotons un peu avant de reprendre la route de bord de mer qui mène à Tarfaya.
Pour l'arrêt pique-nique nous profitons de l'abri d'une petite dune car nous savons qu'elles vont disparaître bientôt de nos paysages.
Nous poursuivons tout le long de la côte, parsemée de petites maisons ou cabanes de pêcheurs, jusqu'à la lagune de Naïla étape désormais habituelle pour nous. Nous bivouaquons sur la falaise devant un magnifique panorama et passons le reste de l'après-midi à regarder passer les barques des pêcheurs, planer les goëlands et admirer le coucher de soleil.
L'anecdote du jour : quelques curiosités de la journée en images ...
Les dunes ont une fâcheuse tendance à traverser les routes dans la région ...
C'est dimanche, même les dromadaires vont à la mer ...
Ici s'est terminée la liaison par ferries entre les Canaries et Tarfaya ...
Pas facile de vendre des anoraks au Sahara Occidental !
Lundi 10 mars :
Le temps est doux et sans vent quand nous nous levons, ça repose ! Nous prenons le temps de regarder les pêcheurs s'activer dans leurs barques avant de reprendre tranquillement notre route. Nous profitons du dernier plein de gazole à prix détaxé avant de nous arrêter après moins d'une heure de route à l'oued Oum Fatma où je tente ma chance à la pêche depuis la falaise, mais sans succès. Il est dit que je ne prendrais rien au Maroc ! Reste que le panorama vaut à lui seul l'arrêt.
En début d'après-midi nous avançons jusqu'à El Aoutia, port de pêche sardinier et sation balnéaire de Tan Tan. Nous ne nous y étions jamais arrêtés et sommes plutôt agréablement surpris par cette petite ville qui fait très "vacances" avec son front de mer et ses villas.
De plus le camping "Les Sables d'or" nous offre électricité, wifi, douches chaudes et restaurant : le grand luxe !
Nous y dinons le soir d'une grande assiette de poissons frits.
L'anecdote du jour : spectacle un peu surprenant en fin d'après-midi ; surfers et pêcheurs à la ligne s'adonnent à leur activité au même endroit de la plage . Les pêcheurs lancent sans se préoccuper des surfeurs qui eux déboulent au milieu des lignes.
"Ma kayench mouchkil" ("pas de problème", une sorte de leitmotiv au Maroc).
Tout semble bien se passer mais on peut imaginer que de temps en temps on retrouve quand même un très gros poisson au bout du lancer !
Le saviez-vous : sur de longues portions de la côte marocaine, la mer est bordée d'une haute falaise et, comme sur les plages, on y rencontre de nombreux pêcheurs. Mais comment remonter des courbines pesant jusqu'à 50 kilos depuis le niveau de la mer jusqu'en haut de la falaise à 30 mètres au-dessus ?
Ces pêcheurs ont développé une technique originale qui consiste à faire coulisser le long de leur ligne une sorte de panier en acier retenu par une solide corde. Il suffit d'amener le poisson dans le panier qui sert alors d'épuisette.
SImple à dire, un peu moins à mettre en oeuvre comme nous avons l'occasion de le voir ce matin. Il faut être deux, bien coordonner les mouvements de la corde et de la ligne et surtout ne pas souffrir du vertige pour s'avancer au plus près du bord pour voir quelque chose.
Bien sûr, la courbine ne se laisse pas faire et s'agite... et là, cette fois c'est elle qui gagne : à moins de dix mètres de l'arrivée elle saute du panier, casse la ligne et retombe à la mer !
Mardi 11 mars :
Au lever le temps est à nouveau superbe et nous fait penser aux belles journées d'été chez nous. Nous quittons El Ouatia non sans passer chez le patissier qui propose d'excellents croissants, pains au chocolat, brioches ... à moins de 10 cts d'euro l'unité.
Nous parcourons un peu plus de 150 kms jusqu'à l'oasis de Tighmert en passant par Tan Tan et Guelmim. Le paysage a complètement changé : finis les immenses regs plats et désertiques, les dunes, le bord de mer, voilà maintenant les contreforts de l'anti-Atlas, les palmiers, l'herbe, les inscriptions en berbère...
Adieu le Sahara marocain dont Guelmim est la porte d'entrée (et donc de sortie).
Comme il y a quelques semaines, nous bivouaquons dans la palmeraie tout près de la très belle Maison Saharaouie de Saliha.
Nous faisons le plein de verdure tout au long d'une promenade dans la palmeraie. Comme les céréales ont poussé et quel contraste avec l'aridité du Sahara !
Le soir nous dinons chez Saliha où nous retrouvons plusieurs de ses "habitués" rencontrés l'an passé.
L'anecdote du jour : un des pensionnaires de Saliha prévient Mohammed, l'homme à tout faire de la maison, que les chèvres sont dans le champ de luzerne. Sans quitter sa position allongée, Mohammed lui répond "C'est normal, la porte elle est cassée". Fatalisme musulman ...
Mercredi 12 mars :
Après avoir salué Saliha et ses pensionnaires, nous quittons notre beau bivouac à l'entrée de la palmeraie.
Un petit café chez Ali Baba à Guelmin et nous reprenons comme à l'aller la très belle route de Sidi Ifni. Elle traverse l'extrémité ouest de l'Anti Atlas qui va se perdre dans la mer. C'est toujours aussi vert dans ces vallées et déjà le bord de la route est coloré par les petits tapis jaunes et roses des fleurs et le rouge des figues de Barbarie.
Nous arrivons vers midi à Sidi Ifni où nous nous installons dans la maison aimablement prêtée par nos amis Isabelle et Jean-Yves. Nous trouvons vite nos marques puisque c'est la troisième fois que nous venons ici, mais comme la maison est grande comparée à la caravane !
Nous pensons y rester 4 ou 5 jours car nous adorons cette maison marocaine très bien placée près de la mer et du centre ville. Ici on fait tout à pied et ça nous repose de notre itinérance habituelle.
Il faut pourtant nous activer dès l'après-midi car la caravane nécessite quelques réparations, après ce qu'on lui a fait endurer depuis quelques semaines : fuite à l'installation de gaz, freins à remettre en service, coffre avant à remplacer et roue jockey crevée ! Nous trouvons assez vite un mécanicien pour les freins, rendez-vous est pris pour le lendemain. La plomberie est aussi démarrée. Le problème ici c'est que l'on trouve difficilement des pièces pour réparer et qu'il faut aller les chercher à Guelmin (d'où nous venons) ou à Tiznit (où nous irons) !
Mais ça avance et il nous reste du temps pour faire tout ça tranquillement. Nous faisons même refaire dans la foulée la toile de nos fauteuils pliants. Les artisans marocains sont vraiment habiles et travaillent à des prix dérisoires pour nous.
Il nous reste du temps pour flâner en ville, régler encore une fois des problèmes de clé 3G et déguster un thé et des msimines (petites crêpes feuilletées au miel) avant de rentrer dans notre nouvelle demeure.
L'anecdote du jour : petite frayeur lors de la mise en service du chauffe-eau. Tandis que nous testons l'eau chaude, une explosion se produit dans le placard sous l'évier, d'où sort de la fumée. Nous voyons rapidement qu'en fait c'est un raccord entre deux tuyaux qui a sauté et la fumée n'était en fait que de la vapeur d'eau.
Le plombier appelé en renfort nous livre un peu plus tard l'explication : le filtre placé à l'extrémité du robinet est bouché par le calcaire, il a fait bouchon et la pression, assez forte, a fait le reste : plus de peur que de mal !
Et comme nous avions besoin d'un plombier pour la caravane ...!
Jeudi 12 mars :
La journée d'aujourd'hui sera consacrée en bonne partie aux réparations. Dès 9 heures la caravane est amenée au "garage" qui se révèle un bout de parking en terre.
Mais le mécanicien semble compétent. Quand je le quitte vers 11 h tout est démonté et remis à neuf sauf les garnitures qu'un de ses aides est parti chercher à Guelmin. Je me consacre alors à la roue jockey qui va me mobiliser une bonne partie du reste de la journée, je vous passe les péripéties ce serait trop long...
Break à midi : nous avons rendez-vous avec un colistier du Maroc en 4x4, Philippe qui nous invite à faire connaissance autour d'un apéritif dans sa maison près de la mer. Lui et sa femme Catherine sont très sympas et nous décidons de diner ensemble samedi soir dans un bon restau situé près de "chez nous".
Pendant que Nickie satisfait pleinement ses envies de lessives, je remonte au front pour les travaux. En fin de journée la caravane est opérationnelle et retourne devant la maison. Une chambre à air est commandée à Casablanca, censée arriver demain soir inch Allah.
Quatre belles soles achetées au marché ce matin nous attendent pour le diner...
L'anecdote du jour : c'est encore notre plombier qui va nous fournir l'anecdote du jour. Comme la caravane est revenue et qu'il y a une odeur de gaz autour de la bouteille il revient faire son diagnostic de façon très simple : il promène son briquet allumé autour du tuyau : là où ça s'enflamme, c'est là qu'est la fuite !
Imparable, mais j'avoue avoir eu un petit moment de recul....
Vendredi 14 mars :
Journée plus tranquille que la veille. Nous profitons du temps parfait pour faire quelques achats et flaner dans Sidi Ifni. Voici en quelques cartes postales : le front de mer, les portes des vieilles maisons arabes, des bâtiments restant de l'occupation espagnole...
Comme tous les vendredis au Maroc c'est jour de couscous et nous sommes invités dans la famille de Malika, la voisine qui s'occupe de la maison d'Isabelle et Jean-Yves. Le couscous est délicieux, accompagné de laben, du lait légèrement fermenté et nous passons un bon moment autour du grand plat. Fatma, la mère de Malika, a perdu son mari récemment et sort tout juste de la période de deuil, imposée par la tradition musulmane, pendant laquelle elle ne pouvait ni sortir, ni voir des hommes chez elle...
Elle ne connait pas son âge (son fils dit qu'elle a 78 ans), est perclue de rhumatismes, mais est très gaie et accueillante, s'efforçant d'améliorer notre arabe car elle ne parle pas le français. Elle a eut quatorze enfants, dont plusieurs vivent autour d'elle, et règne toujours sur la maison et sur sa tribu.
Après ce repas, rien ne vaut une petite séance de transat sur la terrasse. Avec le bruit lointain de la mer, quelques cris de goëlands, le ciel bleu et la tiédeur de l'air marin, on se croirait dans une petite cour des Sables par une belle journée de juillet...
Le plombier rompt cette quiétude mais on ne peut lui en vouloir : il revient avec la solution, vite mise en oeuvre, pour réparer le gaz de la caravane. Pour me prouver le sérieux de son travail, il promène comme hier son briquet tout autour des tuyaux : cette fois, pas de flammes, pas de fuite !
Reste, aujourd'hui, à régler le problème de la roue jockey. Hamdoullah ! Notre boutiquier a reçu la chambre à air, commandée hier soir, par le bus de Casablanca et nous accueille avec exhubérance. Je crois qu'au fond de lui-même il n'y croyait pas plus que nous. Voici donc un troisième problème réglé. Reste à trouver demain le tôlier, à son retour d'Agadir, et faire affaire avec lui.
De fait, grâce à ces réparations nous avons arpenté la ville, fait la connaissance d'un tas de gens et nous nous sentons un peu comme chez nous.
L'anecdote du jour : ici il n'y a pas de poubelles.
Chaque soir les habitants déposent un petit seau ou une poche en plastique avec leurs ordures devant leur maison.
Chaque nuit, les chiens et les chats du quartier s'en donnent à coeur joie et répandent tout dans la rue pour chercher leur pitance.
Et chaque matin des "éboueurs" passent avec une petite charette et un balai pour tout nettoyer.
Ils sont suivis de quelques pigeons et de moineaux qui complètent le ramassage...
Une façon comme une autre d'assurer la subsistance de tous !
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